Dans la capitale chinoise, pas de rentrée pour les enfants de migrants

Publié le 6 Septembre 2011

 

Pendant l'été, la municipalité de Pékin a fermé une vingtaine des écoles où étudient les enfants des mingong, ces travailleurs venus des campagnes pour trimer à la ville. Les fermetures pourraient toucher 30 000 enfants.

Les mingong n'ont décidément pas la vie facile. Venus de campagnes pauvres, ils débarquent dans les grandes villes où ils exercent les travaux dont personne ne veut, pour des sommes dérisoires.

Sur place, ils n'ont pas accès aux services publics dont bénéficient les citadins en raison de leur permis de résidence (hukou) "rural", ce qui en fait, selon certains, des "citoyens de seconde zone". Mais pour les familles de migrants exilées à Pékin, la tâche va encore se compliquer.

Pendant l'été, le gouvernement municipal de la capitale a en effet décidé de fermer plus de 20 de ces écoles privées qui avaient fleuries dans la banlieue pour accueillir ces enfants à des prix modiques, alors que les portes de l'école publique leur sont fermées.

En tout, ce sont près de 30 000 enfants qui ont vu leur établissement mettre la clef sous la porte sur injonction des autorités, officiellement pour des raisons de sécurité.

Il est vrai que ces écoles illégales, fondées par des personnes privées et entièrement financées par les parents d'élèves, ne présentent pas des conditions optimales pour les enfants. Mais elles n'en restent pas moins la béquille nécessaire d'un système qui abandonne à elle-même une partie de sa population.

"Fermer une école revient à ouvrir une prison"

Selon le bureau de statistiques de Pékin, les travailleurs migrants représenteraient environ un tiers de la population de la ville. Leur nombre aurait augmenté de 6 millions depuis 2000.

L'affaire a provoqué une vive réaction de la presse, des internautes et de différents activistes, et les vagues promesses du gouvernement de trouver une solution pour ces enfants n'ont pas suffit à calmer les esprits. D'autant que des associations de défense des travailleurs migrants craignent que cette vague de fermetures de soit qu'un début, et que 130 autres écoles similaires soient bientôt concernées.

Sur Weibo, de nombreuses personnes ont commenté l'affaire. "Fermer une école revient à ouvrir une prison", commente un internaute, paraphrasant Victo Hugo dans un tweet qui a beaucoup circulé.

"Quelle genre d'humanité est-ce là? Il semble que toutes nos politiques soient décidées sans véritable plan et se contentent de foncer tête baissée. Est-ce le résultat d'une mauvaise habitude ou d'une mauvaise balance des pouvoirs?", interroge Chen Hui dans un chat sur le sujet ouvert par QQ.com entre les internautes et Yu Jianrong, spécialisé dans le développement rural à l'Académie des Sciences Sociales de Chine.

Les migrants, indésirables mais nécessaires

"Permettre que des enfants se retrouvent sans école est une atteinte au droit des citoyens à une éducation égale", estime le chercheur. Pour lui, il s'agit d'abord pour les gouvernements locaux de récupérer des terrains.

"Actuellement, beaucoup de gouvernements locaux sont financés par la vente de terrains, et notre nation met en avant la stabilité avant tout. Sans les revenus de lavente des terrains, les gouvernements locaux n'auraient pas assez d'argent pour leur fonctionnement, or cela est la première chose pour assurer la stabilité".

C'est pourquoi la plupart de ces écoles de migrants sont déjà cernées par de grandes tours résidentielles neuves. Et dans la lointaine banlieue, au delà du cinquième périphérique, les quartiers pauvres où habitent les migrants sont eux aussi progressivement rasés, obligeant ces derniers à déménager toujours plus loin.

Pourtant, toutes les villes chinoises n'appliquent pas les même recettes. Plusieurs villes, telles que Chongqing, Chengdu ou Shanghai ont adopté des politiquesd'assouplissement des restrictions imposées à ceux qui ne disposent d'un hukou rural.

Par ailleurs, Shanghai, qui se trouve dans une situation similaire à Pékin, a investi des sommes considérables dans les écoles de migrants, et assure l'accueil de 120 000 de leurs enfants, selon l'hebdomadaire Economic Observer.

Car si de tels bassins de populations défavorisées dans les grandes villes peuvent représenter un danger pour la sacro-sainte stabilité, ces travailleurs pauvres n'en sont pas moins nécessaires au fonctionnement de l'économie.

Dans le New York Times, Kam Wing Chan, chercheur à l'université de Washington spécialisé dans l'étude des politiques chinoises sur les travailleurs migrants, le soutient: "Les classes moyennes détestent voir ce genre de pauvreté, mais ils ne pourraient pas vivre sans cette main d'oeuvre bon marché".

 

Rédigé par Ecole de Tai Ji Quan Côte basque

Publié dans #taichichuan-cotebasque

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